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EDITO

« Les grands amis

Il arrive qu’un de mes contes surgisse dans mon esprit, l’espace d’un souffle, laisse apparaitre un sens nouveau, puis disparaisse discrètement. J’aimerais partager ici l’une de ces visites fugaces, fine comme le passage d’une fée…

L’autre jour, une image du conte du Rêve du Pauvre Homme m’est revenue – vous savez, ce pécheur qui rêve qu’un trésor l’attend là bas, au bout du monde et qui y va, pour s’entendre dire finalement que le trésor est sous son figuier, au centre de son jardin.

Je voyais le moment où il dort, la tête posée sur la racine du figuier. Soudain, j’ai vu le trésor dessous, juste à la verticale de sa tête ! Dans l’histoire, bien entendu, on se garde bien d’en parler à ce moment là ! L’histoire serait fichue.

Certes, le conteur en sait toujours plus que ses héros. Mais pourquoi le conte me montrait-il cela avec insistance ?

Ce conte, chacun l’entend à sa manière. Habituellement, il nous fait sourire car on se trouve tous idiots de voyager pour un trésor qui est déjà là, mais on aime se l’entendre dire. On peut aussi aimer l’importance des racines, la richesse intérieure psychologique, la nécessité d’aller vers les autres ou de voyager loin pour mieux se connaitre, la relation au « vieil homme sage » qui vient dans nos rêves, à ce qui est précieux et que nous partageons par nos contes... bref, ses symboles sont riches.

Je connais ce conte depuis l’enfance. Il m’a offert bien des sens successifs. Mais cette fois-ci, quand il me soufflait « le trésor est déjà là » en une caresse douce comme l’amour du monde, j’ai vu qu’il pouvait porter une parole sur nos courses qui nous emportent ici et là, alors que « tout est là ». C’était beau comme un très beau silence. Nous dormons. Mais nous sommes le trésor.

Vraiment ce sont des grands amis, ces contes qui nous accompagnent ainsi. »

Catherine Zarcate