Le souffle épique

« L’épopée, ou le genre épique, ne se dit pas comme un conte classique. Elle est habitée par ce qu’on appelle « le souffle épique » qu’il faut trouver. C’est une force continue, une puissance, un esprit qui sous-tend l’ensemble et s’exprime bien au-delà des seuls combats qui parsèment traditionnellement ces récits.

Parfois le récit s’enfle et parfois il décroit. Mais même si l’épopée fait une pause, utilisant un ressort d’amour, de poésie, d’humour ou de merveilleux, il n’empêche que le souffle épique est là et traverse tous ces épisodes. Un peu comme le fil de l’eau qui va son train. Pour dire une épopée il faut donc mobiliser :
• Au plan de l’énergie : son envergure et sa gestuelle, son volume, son tonus, son centrage, sa résistance physique et gestion de ses propres forces, son sens de la durée, sa capacité de modulations et variations de volumes et d’intensités, ses capacités rythmiques et de contrastes...
• Au plan des images : sa vision globale vaste, sa capacité de voir et donner vie à des foules, des grands ensembles en mouvements ; sa perception qu’il se passe beaucoup de choses en même temps et comment les rendre synchrones par des esquisses gestuelles ou verbales ; sa capacité d’alterner vision d’ensemble, focus sur une scène habitée par l’émotion, puis retour à l’amplitude.
• Au plan du sens : ses capacités d’exprimer l’ampleur de l’espace, des situations, des hommes, des adversités, des dilemmes et des choix… Et le sentiment d’une direction.
Bien entendu, le corps, les gestes, la respiration, le feu interne, et finalement notre santé, servent tout cela. C’est si fatigant que l’épopée est traditionnellement soutenue par des musiciens ou un instrument, et à juste titre.

Cependant « le souffle épique » ne naît pas par l’effort. Il vient d’une unité qui dirige le récit à travers ses bonds et rebonds, tours et détours, aides et adversaires et l’emporte – nous emporte - au-delà du sens. Mais il y aurait encore beaucoup à dire… »

Catherine Zarcate