« J’ai eu la chance d’avoir une grand-mère et une mère poétesses ; on venait de loin pour les écouter. J’ai baigné dans l’atmosphère magique des veillées où l’on racontait des contes et des énigmes. Dans une société de culture orale, la valeur de la parole est immense. La capacité à ciseler les mots, à inventer des images, est aujourd’hui encore très prisée chez nous. »
Idir
Souvent considéré comme porteur de valeurs archaïques, patriarcales, sinon misogynes, le conte traditionnel se révèle en réalité beaucoup plus féministe qu’il y paraît. Il peut ainsi contribuer à revaloriser l’image et le rôle de la femme. Toutes ne sont pas des Belle au bois dormant ou des Blanche neige qui attendent passivement le Prince charmant. Loin s’en faut ! Plus d’un conte classique met en scène une héroïne qui prend son destin en main et en remontre à la gent masculine : Cendrillon, Peau d’Âne, Psyché ou Vassilissa...
Il y a même des civilisations où la femme est souveraine comme la culture matriarcale touarègue qui fait remonter sa fondation à la légendaire Tin Hinan, la Reine du Sahara. Une culture qui institua aussi l’Ahal, la cour galante, où les hommes ne peuvent courtiser leurs bien-aimées qu’en récitant des poèmes au son de l’imzad, le violon à une corde dont seules les femmes peuvent jouer.
Nos troubadours et trouvères célébrèrent à leur tour la Dame dans leurs chansons et leurs romans de la Table-Ronde. Claudine Glot, la fondatrice du Centre de l’Imaginaire Arthurien, auteure et conférencière dont l’érudition n’a d’égale que son talent de conteuse, viendra nous parler de ce Renouveau courtois qui eut une influence considérable.
Il y eut ainsi des époques où l’imaginaire et la littérature influencèrent la société et firent évoluer la condition de la femme.
Le Festival du Légendaire célébrera donc cette année le féminin à travers des contes merveilleux russes, berbères, irlandais, des légendes touarègues, haïtiennes ou arthuriennes et des fables, des chansons, des proverbes du Sénégal et du Burkina Faso.
Un dialogue entre les peuples, les cultures, qui, au-delà de leur diversité, diffusent les valeurs de la Culture véritable, celle qui élève l’homme, surtout à travers la tradition orale. Un répertoire qui, encore aujourd’hui en Afrique, est transmis essentiellement par les femmes comme en témoigneront deux conteurs, l’un sénégalais, l’autre burkinabé, qui ont à cœur de rendre hommage à leurs mères.